Fondamentaux #3│La sûreté en entreprise

Entretien│avec Georges-Henri Martin-Bricet : l’ESSE, vers une nouvelle culture de la sûreté

Entretien avec Georges-Henri Martin-Bricet, directeur du développement de l’ESSE, paru initialement dans Managers Magazine de septembre-novembre 2018.

Pourquoi une école dédiée à la gestion des risques des entreprises ?

GHMB : Nous  voulions  rompre  avec  les  approches  trop  théoriques  et créer une école avec une vocation ultra-opérationnelle à destination des managers. Notre ambition : créer des certifications professionnelles dans des domaines d’expertise strategiques mais non normés jusqu’alors. L’ESSE est aujourd’hui la seule école spécialisée à proposer 4 certificats de compétence professionnelle dans les domaines de la sûreté, de la gestion de crise, du management du risque de fraude / corruption et de l’enquête interne. Notre offre s’adresse aussi bien  aux managers de PME / TPE qu’aux grandes entreprises du CAC40 et du SBF120.

L’ESSE est aujourd’hui la seule école spécialisée à proposer 4 certificats de compétence professionnelle dans les domaines de la sûreté, de la gestion de crise, du management du risque de fraude / corruption et de l’enquête interne.

Quels sont les points forts de vos formations ?

GHMB : Tous nos certificats sont construits sur des méthodes innovantes appliquées au sein de grands groupes : la méthodologie REACT de gestion de crise ou l’applicatif PARS d’analyse des risques sûreté sont le résultat de 3 ans de R&D au contact de nos clients.  Nos  intervenants  sont  recrutés  sur  un  triple critère : la renommée de leur expertise, leurs capacités pédagogiques et leur connaissance au plus près des risques des entreprises. Nous apportons aussi des réponses et des compétences techniques concrètes par le biais de modules  spécialisés pour anticiper les problématiques des directions à l’image du module Secret des affaires ou de la nouvelle formation Investigation Sapin 2.

Quels sont les enjeux critiques pour les entreprises françaises ?

GHMB : Les  entreprises  françaises  ont  15  à  20  ans  de  retard  sur leurs homologues anglo-saxonnes. Outre-Atlantique, le risk management relève de l’inné et la protection de  l’entreprise n’est   pas   une   variable   d’ajustement   budgétaire   mais   la condition de sa pérennité et de son développement. La fonction Anticipation des menaces est de nature  stratégique  et  seule une minorité d’entreprises françaises a pleinement appréhendé cette nouvelle donne. Le principal enjeu est de passer d’une posture réactive à une posture proactive. L’ESSE les accompagne sur deux plans : d’une part, construire une vraie culture  de sûreté globale chez les dirigeants et, d’autre part, former des risk managers polycompétents et de haut niveau.

 

Nos formations certifiantes

Communiqué│Création du parcours certifiant Management du risque de fraude et de corruption

L’Ecole supérieure de la sûreté des entreprises (ESSE) créé le premier parcours certifiant dans le domaine du management du risque de fraude et de corruption en France. L’ESSE tient à remercier la Fédération française des assurances qui a appuyé la création de ces formations.

La France est le premier pays européen touché par la fraude aux entreprises. L’OCDE estime que 5 à 7 % du chiffre d’affaires des entreprises est diverti par la fraude, qu’elle soit interne ou externe. A ce risque financier s’ajoute désormais le risque conformité porté par les obligations Sapin 2 de lutte contre la corruption.

En créant ce parcours certifiant l’ESSE offre la possibilité aux entreprises de qualifier leur personnel sur un référentiel de compétences de haut niveau et très opérationnel dans le domaine de l’antifraude et de l’anticorruption, en conformité avec les attendus de l’Agence française anticorruption.

Décomposé en deux certificats, ce parcours constitue la première formation enregistrée à l’inventaire de la Commission nationale de certification professionnelle (CNCP) dans ce domaine en France et est éligible au CPF.

Les certificats s’adressent à un public d’auditeurs, de contrôleurs, de responsable financiers et comptables, de responsables commerciaux, de responsables juridiques et de risk managers désireux d’acquérir des compétences fondamentales et spécialisées à la fois dans l’analyse du risque de fraude et de corruption (niveau 1) et dans l’investigation interne (niveau 2).

La direction pédagogique des certificats est assurée par Jean-Paul Philippe, consultant international anticorruption et ancien chef de la Brigade centrale de lutte contre la corruption, Noël Pons, ancien conseiller du Service central de prévention de la corruption.

Ces formations sont déjà déployées en intra-entreprises au sein de groupes du CAC40. Les premières formations inter-entreprises seront ouvertes à inscription à partir de septembre 2018 pour un démarrage début 2019.

Georges-Henri Martin-Bricet, directeur du développement de l’ESSE : « La création de ce parcours certifiant est une réponse directe de l’ESSE au besoin de renforcement des compétences dans le domaine de l’analyse du risque de fraude et de l’investigation interne. Conformément à sa philosophie, l’ESSE a construit deux certificats à vocation ultra-opérationnelle, axés sur les méthodes et les outils, afin de garantir le plus haut niveau d’expertise de ses auditeurs. »

Contact Presse : Georges-Henri MARTIN-BRICET, directeur R&D, 01 79 97 37 33, contact@ess-e.fr

 

Présentation du parcours

Entretien│avec Lilian Laugerat : pourquoi il faut normaliser la sûreté

En France, il n’existe pas de textes clairs permettant aux entreprises et aux établissements de savoir si les moyens de protection mis en place contre les risques malveillants sont en adéquation avec le niveau réel des menaces. Pour remédier à ce problème, Lilian LAUGERAT – expert en gestion des risques sûreté – nous explique pourquoi il est, selon lui, indispensable de mettre en place un système de management de la sûreté.

Fondamentaux #2│L’analyse des risques sûreté

L’analyse des risques sûreté est une méthode qui permet aux entreprises de déterminer les différents scénarios de risques malveillants auxquels elle peut être exposée. Lilian LAUGERAT – expert en gestion des risques sûreté et directeur pédagogique du certificat Sûreté de l’ESSE – explique sur quoi repose cette méthode et pourquoi il est important pour les entreprises de l’appliquer.

Analyse│Gestion de crise : vers un changement de paradigme

Les méthodes traditionnelles de gestion de crise évoluent pour se recentrer davantage sur la prise en compte des demandes des parties prenantes. Un changement de paradigme qui implique pour les entreprises de passer d’une communication basée sur la compassion à une attitude empathique proactive.

À l’heure de l’hypermédiatisation, les entreprises peuvent rapidement être confrontées à des crises d’une ampleur massive lorsque survient un événement regrettable ou un dysfonctionnement. On se souvient par exemple de l’affaire Findus et de ses lasagnes à la viande de cheval en 2013, du “DieselGate” de Volkswagen avec ses moteurs truqués en 2015 ou encore de la récente crise du lait infantile Lactalis contaminé à la salmonelle.
Si la réponse n’est pas rapide et correctement orchestrée, la crise peut avoir des conséquences néfastes pour l’entreprise, en matière de notoriété bien sûr mais aussi de part de marché.
Si en France, environ 1/3 des entreprises se préparent à la survenue de ce type d’événement, elles ne font pas toujours évoluer leurs procédures. Or, on assiste aujourd’hui à un véritable changement de paradigme dans les méthodes de gestion de crise….

Un scénario de plus en plus fréquent : la crise à double détente

La crise se définit comme un événement générant des impacts sur l’entreprise qui ne peuvent pas être entièrement gérés par les procédures habituelles. Ces impacts sont classés en cinq grandes catégories : les personnes, l’activité, l’image, la responsabilité et l’environnement. Si la sévérité de l’un de ces impacts dépasse les capacités usuelles, l’entreprise bascule dans le temps de la gestion de crise. C’est à dire qu’elle met en place une posture dérogatoire qui lui permet de gérer les conséquences de l’événement.

Aujourd’hui, les méthodes traditionnelles permettent de circonscrire un grand nombre de situations de crise. En revanche, elles montrent leurs limites dans la gestion des caractéristiques inhérentes à l’évolution de notre société : la prise en compte des demandes des parties prenantes.

En effet, les entreprises ont souvent l’habitude de s’adresser aux parties prenantes à travers les médias. La communication de crise reste un domaine très codifié qui s’appuie en majorité sur la compassion. Autrement dit, l’entreprise communique sur son association aux sentiments des parties prenantes mais rarement sur les actions qu’elle met en place pour répondre à leurs demandes.

L’entreprise communique sur son association aux sentiments des parties prenantes mais rarement sur les actions qu’elle met en place pour répondre à leurs demandes.

À l’ère des réseaux sociaux, cette posture peut avoir des effets dramatiques. Il suffit de seulement quelques heures au bad buzz pour se propager sur la toile, à l’échelle nationale voire mondiale… Par ailleurs – toujours grâce aux réseaux sociaux – les victimes de la crise peuvent se retrouver et communiquer extrêmement facilement. Sans réponse adaptée de la part de l’entreprise, elles n’hésitent pas à s’organiser juridiquement pour obtenir explication et réparation. Cette réaction des parties prenantes est ce qu’on appelle une crise à double détente, une “crise dans la crise” en somme. C’est un scénario de plus en plus classique.

De la compassion à l’empathie

En réalité, la compassion ne suffit plus. Les organisations de gestion de crise doivent désormais faire preuve d’empathie. Il s’agit de communiquer et de se coordonner avec l’ensemble des parties prenantes identifiées, dans le but de bâtir des plans d’actions adaptés et en adéquation avec la réalité de leurs problèmes.

Au-delà de la gestion incontournable des impacts, le travail d’une cellule de crise consiste donc désormais à prendre en compte le plus rapidement possible les attentes des parties prenantes impactées. Cela ne signifie pas pour autant qu’il faille leur apporter une réponse immédiate. Mais l’entité chargée de la gestion de crise doit leur montrer d’une part, que l’entreprise a compris leurs problématiques et leurs préoccupations. Et d’autre part qu’elle travaille d’arrache-pied à leur apporter une réponse satisfaisante dans les meilleurs délais.

Le travail d’une cellule de crise consiste donc désormais à prendre en compte le plus rapidement possible les attentes des parties prenantes impactées.

Les organisations doivent prendre en compte dès maintenant ce changement de paradigme. Dans le contexte de la mondialisation et avec l’avènement des réseaux sociaux, c’est l’un des moyens les plus efficaces pour une entreprise de minimiser les impacts d’une crise sur sa réputation.

L’École Supérieure de la Sûreté des Entreprises (ESSE) a mis en place un Certificat “management de la crise”. C’est la première formation certifiante en France qui vise à préparer les organisations à faire face à des crises majeures et qui renforce les compétences des personnes responsables de l’organisation de la gestion de crise.

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Analyse│Les enjeux informationnels de Sapin II : vers une compliance 2.0

La loi Sapin II sur l’anti-corruption oblige désormais les entreprises à vérifier l’intégrité de leurs tierces parties : clients, fournisseurs, sous-traitants, partenaires commerciaux. Une telle contrainte va les amener à systématiser leurs démarches de renseignement économique. Pierre Memheld, expert dans le domaine de la due diligence, nous éclaire sur les enjeux de cette compliance 2.0.

La France a mis en œuvre dans le cadre de la loi Sapin II, l’un des dispositifs anti-corruption les plus ambitieux au monde. Cette loi crée l’obligation, pour toutes les entreprises faisant plus de 100 millions d’euros de chiffre d’affaires et ayant au moins 500 salariés, de mettre en place des procédures anti-corruption impliquant le développement d’un système d’information interne et externe. Parmi les huit piliers du dispositif figure notamment l’obligation pour l’entreprise de vérifier l’intégrité des tierces parties – clients, fournisseurs, sous-traitants, partenaires commerciaux – avec lesquelles elle traite. L’entreprise doit être en mesure de démontrer qu’elle a accompli, en amont de la relation commerciale, toutes les démarches d’évaluation du risque de corruption lié à ces tierces parties.

Cette obligation est lourde de conséquences du point de vue de la gestion et de la structuration de la data « conformité » au sein des entreprises. Elle va en effet contraindre les acteurs économiques à mettre en œuvre de véritables bases de données anticorruption en interne et à déployer des systèmes de veille et d’investigation de leur information commerciale. Comment les entreprises peuvent-elles gérer cette nouvelle donne ?

huit piliers loi sapin 2
Crédit : © GORON

Les enjeux informationnels de la compliance

L’intelligence économique – comme outil de management de l’information et de coordination des actions – peut servir dans ce cadre, en l’appliquant à l’activité spécifique d’évaluation des risques définis par la loi. Elle a en effet un rôle stratégique du fait de sa connaissance approfondie des compétences internes et des risques éventuels ou encore du jeu des acteurs de l’environnement concurrentiel. Le principal défi qui se pose au management de l’information de et par l’entreprise est celui de la distribution des tâches entre ce qui peut (et doit) être effectué en interne et les missions annexes externalisables. En effet, si la veille juridique ou certaines investigations peuvent être externalisées, il n’en va pas de même pour l’interface avec les fonctions opérationnelles ou financières, ou encore la préservation de la confidentialité des objectifs stratégiques ou technologiques de l’entreprise. D’autres fonctions, nécessairement liées à la conformité, sont externalisées comme la certification des comptes ou la formation continue des personnels. L’analyse et la cartographie des risques de corruption, qui constituent la pierre angulaire de Sapin II, représentent le préalable à la délimitation du périmètre informationnel du système de veille et à la répartition de ses acteurs, internes et externes.

Le principal défi qui se pose au management de l’information de et par l’entreprise est celui de la distribution des tâches entre ce qui peut (et doit) être effectué en interne et les missions annexes externalisables.

S’il est facile d’identifier un concurrent, un groupe criminel est lui, moins visible. D’autant que les groupes criminels plus organisés investissent souvent dans des affaires légales, voire dans le lobbying politique à haut niveau. L’entreprise doit donc être capable d’anticiper et d’appréhender les évolutions de l’environnement. Cette anticipation, de nature stratégique, passe l’acquisition de méthodes d’analyse et le déploiement d’un système de veille interne à l’entreprise.

Le risk management étant par nature transverse et pluridisciplinaire, c’est en combinant ces différentes approches que l’entreprise peut construire une grille d’évaluation qui lui est propre et qui prend en compte les problématiques propres à son secteur et à ses pays d’activité (notamment les lois et régimes applicables dans le domaine anticorruption), les analyses et l’historique des risques disponibles. Enfin un management de l’information n’est efficace que si le système de veille repose sur un cross-checking systématique et actualisé des sources d’information.

Les rapports d’investigations (due diligence)

Trouver de l’information n’est plus aujourd’hui un défi mais un problème compte tenu de la masse d’informations à traiter. Si les « masses de données » (big data), la cartographie relationnelle ou encore les outils de veille nous aident à exploiter l’information collectée, ils ne nous aident pas à l’analyser. Dans le cas particulier des due diligence – concept anglo-saxon qui désigne l’ensemble des procédures de vérification – il s’agit d’agréger dans un document synthétique correspondant aux exigences informatives de la loi et aux standards ISO internationaux, l’ensemble des informations pouvant constituer un risque pour l’entreprise concernée. L’ensemble des tierces parties contractuelles sont concernées : fournisseurs, prestataires, intermédiaires, partenaires, investisseurs mais aussi clients !

Une due diligence peut être faite dans le cadre d’un investissement, comme une fusion/acquisition, ou d’un partenariat, pour évaluer la santé financière et les capacités industrielles d’une entreprise. Mais il s’agit ici d’évaluer les risques de tous les co-contractants : peut-on remettre en question la réputation d’un client ? Oui si l’on considère certains cas récents. D’autant que la majeure partie des sollicitations de corruption ont pour origines les autorités et clients publics, en particulier dans le cadre des appels d’offres. Les éléments à identifier sont donc : le risque pays, l’existence de dossiers juridiques et de la réputation de la tierce partie.

Les éléments à identifier sont donc : le risque pays, l’existence de dossiers juridiques et de la réputation de la tierce partie.

A partir d’une requête, la procédure à suivre est relativement « simple » : recherches sur les sources ouvertes (l’internet « de surface » et le « deep web » comme les bases de données payantes), les sources officielles et spécialisées (registres du commerce, décisions de justice, listes de sanctions). Il faut évidemment vérifier toutes les informations, les rapports pouvant être utilisés en justice : homonymies, incohérences, plausibilité (seules les informations vérifiées étant intégrées).

Selon les cas, l’entreprise peut vouloir utiliser une méthode d’analyse du risque – chacune ayant sa propre grille ou utilisant une méthode générique (Heat Map, COSO, ISO 37001) – ou au contraire exploiter l’information brute (un article négatif sur la réputation ou une décision de justice ancienne peuvent suffire à impacter la relation contractuelle).

Cette évaluation doit être objective. Comme pour le processus d’alerte interne décrit par la loi, le risque est que le dirigeant commanditaire de l’évaluation soit lui-même impliqué dans un processus visant à corrompre. Ce scénario n’est pas fréquent mais pose la question du « juge et partie ». L’information permettant de prendre une décision, investir dans tel pays avec tel partenaire, doit être la plus impartiale possible aux yeux de la loi. En cas d’enquête judiciaire, le procureur, et en dernier lieu le juge, prendra en compte la qualité du processus dans sa décision.

On le voit, les enjeux informationnels et organisationnels ont donc désormais un impact majeur sur la manière dont les entreprises mènent leurs opérations et se développent.

Analyse│La formation des managers dans les métiers de la sécurité privée

Ces dernières années, la politique de formation dans les métiers de la sécurité privée s’est essentiellement concentrée sur les formations d’entrée et les agents, laissant la réflexion sur la qualification des managers dans une impasse. Comment remédier à cet angle mort ? Georges-Henri MARTIN-BRICET, directeur du développement de l’ESSE, et Raynald THELAMON, responsable sécurité/sûreté, tentent d’éclairer cette problématique.

Où en est aujourd’hui la réflexion du secteur de la sécurité privée sur la formation des managers intermédiaires, notamment chefs de site et responsable d’exploitation ? Nulle part serait-on tenté d’avancer au vu de l’inertie des organisations professionnelles sur ce volet. Alors que l’architecture de formation des agents a été finalisée en 2013 conduisant à une augmentation de la durée du CQP APS, et que l’année 2018 a vu l’introduction du recyclage obligatoire (MAC), la formation des managers reste aujourd’hui largement impensée et non structurée par la profession.  Ainsi, à ce jour, hormis le SSIAP 3 pour la sécurité incendie, aucun référentiel n’encadre les compétences des managers sécurité/sûreté, chefs de site et responsables d’exploitation du secteur. Cette situation est d’autant plus paradoxale que la qualité de l’encadrement représente un des principaux arguments de différenciation des grands opérateurs pour mettre en relief leur offre technique.

La sûreté, compétence pauvre de la profession

Le flou qui règne sur la formation des managers renvoie avant tout à l’absence de normes sur le travail et les compétences en sûreté. En effet, hormis les secteurs de niche réglementés soumis à habilitation comme l’aéroportuaire, la sûreté portuaire et maritime et la protection rapprochée et armée, le vide normatif est total.

Hormis les secteurs de niche réglementés soumis à habilitation comme l’aéroportuaire, la sûreté portuaire et maritime et la protection rapprochée et armée, le vide normatif est total.

Ainsi, en l’absence de référentiel commun et de contraintes réglementaires, l’appellation de responsable sûreté est aujourd’hui largement usurpée. De fait, la fonction de chef de poste sûreté est quasiment inexistante. C’est en réalité le responsable d’exploitation et/ou le SSIAP 3 qui remplissent cette fonction, sur le fondement de leur seule expérience et sans formation certifiante en amont. L’absence de norme est également dommageable aux acteurs du conseil en sûreté qui évoluent sur un marché totalement anarchique au niveau de la qualité des prestations et des prix : il n’est en effet pas rare de voir des audits de sûreté confiés à des sociétés spécialisées en sécurité incendie.

C’est ce vide qu’a tenté de combler l’ESSE – l’Ecole Supérieure de la Sûreté des Entreprises – en créant en décembre 2016 le premier de certificat de compétence professionnelle en gestion des risques sûreté. Dès ses débuts, l’ESSE s’est donnée pour mission de normer le domaine par une approche très opérationnelle du management du quotidien.

La réflexion de l’école sur les fondamentaux de la mission s’est déployée sur quatre plans :

1) la capacité du responsable à conduire et à établir une analyse de risques à partir d’indicateurs qui permettent de quantifier les risques par rapport au contexte de l’organisation et de hiérarchiser les scénarios de menace

2) sur le fondement de cette analyse de risques, la conception d’un système de protection lié à des standards – organisationnels et opérationnels – adaptés aux menaces

3) la capacité à contrôler le plan de sûreté et l’adéquation des moyens mis en place avec les menaces et à conduire un diagnostic du dispositif

4) enfin la capacité à gérer une crise en cas d’impact majeur – d’attentat terroriste notamment – et organiser la réponse d’urgence.

Cette démarche permet de quantifier très précisément l’analyse des risques sûreté et de développer des indicateurs de performance opérationnelle. Les solutions proposées qui en découlent sont donc expliquées et explicables par rapport à l’analyse des risques et du contexte. Une telle quantification permet à la fois de développer et de contrôler les performances opérationnelles du dispositif de sûreté mais constitue également pour les managers, un instrument d’arbitrage objectif quand il s’agit de négocier une dotation de moyens techniques ou humains auprès de la direction et/ou des achats.

Cette structuration des compétences en sûreté est donc la première pierre du dispositif de formation des managers mais elle n’est seule, pas suffisante.

Un référentiel de compétences à formaliser

Qu’est-ce qu’un chef de service sécurité/sûreté ? Dans l’idéal, c’est un manager d’abord, maîtrisant les outils de gestion administrative et financière et humaine, un expert technique ensuite, à la fois dans le domaine de la sécurité incendie et de la sûreté. Enfin, de manière optionnelle mais aussi décisive dans le contexte terroriste qui est celui de la France post-2015, un gestionnaire de crise. Il a pour principale mission la conception, la mise en œuvre, l’animation, le contrôle et l’amélioration du système de management de la sécurité et de la sûreté d’un site ou d’une organisation.  

Le pilotage et le contrôle de ce système de management supposent la maîtrise d’un certain nombre de fondamentaux, en particulier sur le plan des problématiques gestionnaires. Si on s’en réfère au seul niveau de management actuellement réglementé – à savoir le diplôme SSIAP 3 – celui-ci est cantonné à l’expertise technique de la sécurité incendie et ne traite qu’à la marge les réalités quotidiennes d’un chef de site.

Or, les responsables d’exploitation (REX) font face à des tâches de gestion administrative et de management de plus en plus importantes et complexes. En effet le chef de service et le REX, qui partagent les mêmes préoccupations, sont à la fois des managers, des auditeurs, planificateurs, coordonnateurs, contrôleurs, assistants RH, assistants qualité et aussi, bien souvent, assistants sociaux. L’empilement et la diversité de ces missions conduit souvent à démoraliser des chefs de site non formés aux réalités du terrain, soumis à la pression légitime du client, et qui se sentent progressivement abandonnés par leur hiérarchie.  

Les responsables d’exploitation (REX) font face à des tâches de gestion administrative et de management de plus en plus importantes et complexes.

La nécessité d’un diplôme « Manager sûreté/sécurité »

En réalité ce qui manque actuellement dans le parcours métier est bien un diplôme de « Manager sécurité/sûreté » qui prenne en compte dans son ingénierie, les problématiques concrètes du poste. Un tel diplôme devrait réunir quatre bloc de compétences : un bloc sécurité (qui existe déjà avec le SSIAP 3), un bloc sûreté, un bloc gestion de crise et enfin un bloc de management technique appliqué aux métiers. Ce dernier bloc doit adresser dans le détail les problématiques administratives, gestionnaires et RH du poste.

Un tel diplôme devrait réunir quatre bloc de compétences : un bloc sécurité (qui existe déjà avec le SSIAP 3), un bloc sûreté, un bloc gestion de crise et enfin un bloc de management technique appliqué aux métiers.

Le déploiement d’un tel diplôme de niveau II RNCP aurait l’avantage pour les employeurs, de préqualifier leurs managers et de s’assurer de leurs maîtrises des fondamentaux. Sur le plan technique, il permettrait d’organiser la convergence des expertises en sécurité et sûreté, le maintien en silos des métiers ne répondant plus aux besoins de progression des individus ni à ceux des donneurs d’ordre. Cette double compétence (qui n’est en aucun une fusion des domaines) est autant appelée par les managers que par les donneurs d’ordre qui y voient le meilleur moyen d’optimiser leurs dispositifs sur le plan organisationnel¹. Enfin, en unifiant plusieurs formations ou blocs de compétences jusqu’à présent éclatés, ce titre professionnel permettrait de répondre aux frustrations liées au financement et à la compatibilité entre le temps de formation et la gestion de l’activité du salarié. L’obtention d’un tel diplôme devrait logiquement intervenir, en fonction du potentiel du salarié, entre sa cinquième et sa quinzième année d’activité.

Ce diplôme technique pourrait parfaitement être complété par un diplôme/titre de management généraliste d’école de commerce visant le périmètre d’activité d’un responsable d’exploitation. Le défi principal consiste en effet à inscrire les fonctions sécurité/sûreté dans la chaîne de valeur de l’entreprise, afin qu’elles ne soient plus perçues comme un centre de coût ou un ensemble de contraintes réglementaires mais au contraire, qu’elles participent pleinement à la pérennisation de l’entreprise et à son développement.  

C’est cette logique qui a notamment présidé à la mise en place du parcours que délivre l’ESSE en partenariat avec ICN Business School de « Manager de centre de profit spécialisé ». Les candidats peuvent ainsi suivre parallèlement la formation Formacadre de ICN (titre de niveau II, équivalent bac +3/+4) et le certificat Sûreté de l’ESSE. De manière symptomatique, nombre de candidats venus à l’ESSE pour renforcer leurs compétences techniques ont également choisi le parcours ICN afin de valoriser leur profil et de consolider leur évolution professionnelle. L’USP s’est associée dans cette même logique avec l’IFAG afin d’offrir un programme spécialisé de « Responsable Projet et Développement d’Activité». L’objectif dans les deux cas est le même : développer les aptitudes des cadres de la sécurité privée dans les domaines de la gestion de la clientèle, des aspects commerciaux du poste, des enjeux juridiques et RH et les former à l’animation des équipes et au leadership.

En résumé, le secteur de la sécurité privée, dans l’effort de structuration qu’il a entrepris depuis dix ans, ne peut plus faire l’économie d’une réflexion rapide sur la formation de ses managers. Gageons que la réforme de l’architecture de formation appelée de façon unanime par les organisations professionnelles prendra nécessairement en compte cette évolution. L’essentiel étant que l’ingénierie de formation qui en résultera ne soit pas le produit d’un compromis mais bien une réponse pédagogique pragmatique aux besoins des individus et des entreprises de sécurité. Une telle évolution ne pourra voir le jour qu’avec la remise à plat d’une convention collective désormais dépassée et un changement de la politique de prix délétère des grands acheteurs (Etat et grandes surfaces au premier rang). C’est à cette seule condition que le secteur pourra parachever sa professionnalisation, conjurer sa crise structurelle et assurer son avenir.  

¹ Mentionnons néanmoins que la rationalisation des compétences apportée par l’unification des formations ne supprimera pas le besoin en personnel. Celui-ci restera le même qu’aujourd’hui, un manager ne pouvant se dédoubler et devant aussi être secondé, par un SSIAP 3 adjoint en charge du pôle sureté par exemple.

 

Evénement│Certificat Sûreté : remise des diplômes 2017

L’ESSE a organisé le 23 novembre 2017 une cérémonie de remise des diplômes aux quatre premières promotions du certificat Management de la sûreté, première formation certifiante dans son domaine : 31 diplômés, chefs de site et responsables d’exploitation, qui mettent en œuvre au quotidien la méthodologie d’analyse des risques dispensée dans la formation. 

En créant le premier certificat de compétence professionnelle dans le domaine de la gestion des risques sûreté, l’ESSE aura répondu à un de ses objectifs fondateurs : proposer une formation opérationnelle et innovante qui adresse les besoins du management du quotidien.

Deux ans après sa création, le certificat s’impose progressivement comme une formation de référence pour les managers sécurité/sûreté.

Le certificat Management de la sûreté vient ainsi consolider la filière de compétences des métiers de la sécurité/sûreté et compléter utilement le panel des formations obligatoires.

En 2018 l’école poursuit son ambition : celle de former la nouvelle génération de managers sécurité/sûreté de demain.

Merci et félicitations à tous les participants et à l’équipe pédagogique !

Analyse│La sûreté, un enjeu stratégique majeur pour les entreprises

Les entreprises ont trop souvent tendance à considérer les mesures de sûreté comme des coûts obligatoires. Elles devraient au contraire les envisager comme un investissement nécessaire et indispensable pour protéger leurs salariés et assurer leur image de marque face à des menaces réelles.

En France, les entreprises peinent à mettre en œuvre une véritable culture de la sûreté, c’est à dire des plans, des procédures et des moyens concrets pour se prémunir contre des actions malveillantes qui pourraient être perpétrées à leur égard. Aujourd’hui, peu de dirigeants sont à même d’expliquer concrètement ce qu’ils ont mis en place pour protéger leur entreprise dans son ensemble.

Cette réalité est d’autant plus criante lorsque survient un événement malveillant : cyber-attaque, fraude au président ou encore attentat terroriste. Outre la mise en danger des salariés ou des clients, ces phénomènes laissent des traces durables, pour ne pas dire indélébiles auprès de l’opinion publique.

Comment en arrive-t-on là ? La plupart du temps, car les mesures de sûreté ne sont pas encore considérées à leur juste importance au sein des entreprises.

Sortir de la seule logique des coûts

La preuve la plus flagrante de ce manque de considération : la majorité des consultations et appels d’offres affichent le prix comme critère principal de sélection des prestations de sûreté / sécurité. Au même titre qu’une simple assurance multirisques, les entreprises ont tendance à y souscrire par obligation, en cherchant les moins “disantes” sans vraiment se soucier de ce qu’elles englobent réellement. En résumé, dans l’esprit des dirigeants, les prestations de sûreté / sécurité représentent un coût. Elles devraient au contraire être considérées comme un investissement utile et indispensable pour protéger leurs salariés et assurer leur image de marque face à des menaces réelles.

En effet, parmi les devoirs stratégiques d’une Direction se trouve l’obligation de protéger le personnel. La responsabilité des entreprises est aujourd’hui un enjeu majeur. Par ailleurs,  l’entreprise doit veiller à son image et à sa notoriété qui font partie de son capital immatériel. La réputation a en effet des impacts directs sur la confiance accordée par les clients et en conséquence sur le volume d’affaires. Qu’une institution ne soit pas capable d’apporter la preuve qu’elle a mis en œuvre tous les moyens nécessaires pour prévenir la réalisation d’un risque ou d’un incident, n’est pas acceptable par l’opinion. Même lorsque la solution est apportée rapidement au problème, le public retient le défaut d’anticipation.

Ainsi, outre la protection indispensable du personnel, mettre en oeuvre une véritable culture sûreté, c’est aussi préserver la stabilité commerciale et financière de l’entreprise.

Outre la protection indispensable du personnel, mettre en oeuvre une véritable culture sûreté, c’est aussi préserver la stabilité commerciale et financière de l’entreprise.

Entrer dans une logique d’investissement

Il est donc temps pour les dirigeants de changer d’état d’esprit et de remettre la sûreté au cœur de la stratégie des entreprises et des institutions. Cela revient à choisir ses partenaires sécurité et sûreté dans une logique de performance et non pas de coût. Tout l’enjeu est de trouver l’équilibre entre rentabilité et sécurité globale pour entrer dans une logique d’investissement.

Tout l’enjeu est de trouver l’équilibre entre rentabilité et sécurité globale pour entrer dans une logique d’investissement.

Considérés à leur juste place, ces partenaires pourront auditer finement tous les risques et les menaces qui pèsent sur l’entreprise : qu’ils soient internes (sociaux, techniques, organisationnels, financiers, etc.) ou externes (politiques, environnementaux, commerciaux, liés à la production, à la sous-traitance, aux partenariats, au marché, etc). Les mesures de sûreté qui ressortiront de cet audit impliqueront pour l’entreprise d’y affecter toutes les ressources techniques, financières, et humaines nécessaires. Par ailleurs, les mesures devront être intégrées à tous les niveaux des processus décisionnels : de la R&D au développement commercial, de la conception de la stratégie à son application sur le terrain.

Entretien│avec Stéphane Morelli : les applications sûreté des drones

Si en 2018 leur part du marché est encore faible, l’arrivée massive des drones dans les années à venir pourrait représenter une rupture technologique d’ampleur pour les professionnels de la sûreté. Les drones constituent en effet une solution optimale pour compléter le travail des agents sur le terrain, notamment en ce qui concerne la levée de doute et les missions de surveillance.

L’ESSE a eu le plaisir de conduire un entretien avec Stéphane Morelli, directeur général de Azur Drones, une des start-up françaises les plus innovantes du secteur.

Un entretien de fond qui éclaire l’ensemble des problématiques des applications sécurité/sûreté en dronautique : état de l’art des technologies, potentiel de développement du marché français, attente des acteurs de la sécurité privée, formation des agents.

Fondamentaux #1│Sûreté et sécurité : une question de définition

La majorité des personnes, dans la vie civile comme dans le monde de l’entreprise, ne connaît pas la différence entre la sûreté et la sécurité.

Lilian Laugerat – directeur du certificat Management de la sûreté – revient sur ces définitions fondamentales. Il explique pourquoi il est aujourd’hui essentiel de normaliser la sûreté en France afin de structurer ce secteur professionnel.